Éloïse Plamondon Gagné est une artiste multidisciplinaire de Québec intégrant à sa démarche l’installation, l’estampe, la vidéo, la photographie, le dessin et l’écriture. Elle réalise diverses résidences artistiques à travers le monde qui contribuent à nourrir son imaginaire de création. Sa pratique est inspirée par le mouvement et par le temps. En 2019, elle réalise un projet de carnets de dessins lors d’une résidence de recherche et création en Islande, où le solstice d’été est marqué par le soleil de minuit et les grandes migrations d’oiseaux. Parcourant les falaises du littoral, elle filme chaque jour le paysage vierge entre les volcans de l’arrière-pays et l’océan arctique à perte de vue. Pendant ces longues périodes vigilantes de captation d’images, elle remarque les trajectoires des oiseaux dans le ciel et est impressionnée par leurs vols exaltés après leur long périple qui apparaissent dans ses prises de vue. Elle commence alors à dessiner leurs trajectoires à main levée, utilisant les feuilles de son cahier comme autant de fenêtres pour capturer les instants de la nature immense.
Sources consultées
(X) Site personnel de l’artiste : https://eloiseplamondonpage.com/a-propos/
Le dessin automatique se présente comme une forme d’art non conventionnelle, puisqu’il ne correspond pas à la définition classique du dessin. Il se définit plutôt comme une forme d’improvisation réalisée à partir des diverses techniques attribuées au dessin, dans le but d’explorer l’inconscient par un geste non contrôlé.
L’objectif de l’utilisation de cette méthode de dessin plus instinctive est d’éliminer les freins de la créativité engendrés par la conscience, en permettant à la main de dessiner sans idées préconçues ou sans l’intervention de la censure ou de la raison sur le geste. Ainsi, dans la pratique du dessin automatique, la main ou l’outil utilisé pour laisser une trace sur le papier (support) sont autorisés à se déplacer « sans trajectoire déterminée ». Puisque les différentes marques sont engendrées par l’accident ou le hasard, le processus créateur du dessin est libéré du contrôle de la raison. C’est pourquoi le résultat dessiné est souvent attribué au subconscient et peut parfois même révéler des pensées intérieures ou des émotions (psyché) qui seraient autrement réprimées.
Cette forme d’expression automatique a été explorée de multiples manières dans l’histoire de l’art. Par exemple, certains artistes vont dessiner à l’aveugle, c’est à dire les yeux fermés ou masqués, ou encore, en utilisant des stratégies diverses pour ne pas voir ou contrôler le processus de réalisation du tracé. Le dessin est réalisé librement, simplement guidé par la pensée sans la moindre présence du jugement critique de la conscience. Par la suite, il appartient à l’artiste de poursuivre ou non la trace générée par ce procédé de dessin improvisé.
Cette méthode permet de vaincre l’angoisse de la page blanche, car elle engendre un premier geste qui propulse l’imaginaire de manière inattendue.
Sources consultées
(X) HISOUR ART CULTURE HISTOIRE, visite virtuelle, exposition d’art, histoire de la découverte, culture mondiale, [https://www.hisour.com/fr/automatic-drawing-painting-17610/].
(X) COLLINS, Neil. L’automatisme dans l’art : définition, histoire, caractéristiques, techniques surréalistes, Encyclopédie Gallerix, [En ligne], [https://fr.gallerix.ru/pedia/definitions–automatism/].
(X) VASSEUR, Catherine. TANGUY YVES – (1900-1955), Encyclopædia Universalis, [En ligne], [https://universalis-rdl.proxy.collecto.ca/encyclopedie/yves-tanguy/] (Consulté le 11 février 2023].
(X) BRETON, André. Yves Tanguy, Éditions Pierre Matisse, New York, 1946.
(X) MARCHESSEAU, Daniel. Yves Tanguy, coll. La septième face du dé, Filipacchi, Paris, 1973.
(X) MAUR, Karin von. Yves Tanguy and surrealism / Karin von Maur; with essays by Susan Davidson… et al., Staatsgalerie de Stuttgart, Menil Collection, Houston, Hatje Cantz, Ostfildern Ruit, 2001.
(X) WALDBERG, Patrick. Yves Tanguy, Éditions André de Rache, Bruxelles, 1977.
(X) Yves Tanguy, catal. expos., texte de J. T. Soby, The Museum of Modern Art, New York, 1955.
Un peu d’histoire…
« Ce que les artistes font, c’est créer de nouvelles connexions entre les choses ».
Du dessin et de la couleur – Félix Bracquemond
Le dessin automatique est souvent associé au surréalisme et à la psychanalyse en raison de son intérêt pour l’inconscient et la libération de l’esprit du contrôle conscient.
Le surréalisme est un mouvement littéraire et artistique qui s’épanouit à Paris au début des années 1920. Les techniques artistiques explorées par les artistes de ce courant emprunteront plusieurs notions à la psychanalyse freudienne et au marxisme, en ce sens que les surréalistes cherchaient à créer un art « automatique », c’est-à-dire émanant directement de l’inconscient sans être façonnés par la raison, la moralité ou les jugements esthétiques.
D’abord initiées par André Breton, les techniques d’écriture et de dessin automatiques seront explorées par quelques membres du groupe. Max Ernst, André Masson et Miró expérimenteront aussi d’autres modes d’expressions artistiques dits automatiques (non contrôlé par la raison ou par le geste prémédité). Ils utiliseront souvent une approche plastique basée sur le hasard pour accéder au monde de l’inconscient. Afin d’échapper au contrôle conscient du processus créateur et pour atteindre le dépaysement, les surréalistes (automatistes) exploreront diverses techniques telles que :
- le dessin automatique;
- le frottage;
- le fumage;
- le cadavre exquis.
Ces techniques de dessin qui cherchent à provoquer l’imaginaire seront expliquées et illustrées dans ce chapitre à l’aide d’exercices de recherches d’œuvres sur Internet et d’exemples d’applications des modes d’expressions artistiques dans un contexte historique et actuel.
Sources consultées
(X) DEBICKI, Jacek, et autres. Histoire de l’art : peinture, sculpture, architecture. Paris, Hachette, 1995, 320 pages.
Le dessin et l’automatisme
André Masson est considéré comme le pionnier du dessin automatique, mais plusieurs autres artistes de son époque ont également pratiqué cette technique, soit les artistes ayant de près ou de loin fréquenté le groupe des surréalistes en France tels que Jean Arp, Salvador Dalí et Pablo Picasso. Tandis qu’en Angleterre, Austin Osman Spare a également utilisé une forme de dessin automatique dans ses œuvres ultérieures, en particulier dans ses gravures et ses séries lithographiques des années 1960.
André Masson, dessins automatiques et tableaux de sable
André Masson s’associe brièvement au mouvement surréaliste durant les années 20. Sa participation au groupe sera cependant brève puisqu’il trouve leurs recherches artistiques plutôt conservatrices (orthodoxes). Toutefois, il en conserva l’esprit surréaliste dans ses œuvres jusqu’en 1945. Il est reconnu pour ses « dessins automatiques » et ses « tableaux de sable ». Ces derniers représentent une forme de réponse plastique à l’« automatisme psychique » lancé par André Breton en 1924 dans le Manifeste du surréalisme. Les tableaux de sable sont élaborés à l’aide d’une technique où la colle appliquée sur la toile réagit de manière incertaine en retenant des accumulations de sable aléatoirement. Son influence est particulièrement marquante à New York pendant la Seconde Guerre mondiale, où il a dû fuir l’Allemagne nazie et s’installer. Ses tableaux de cette période représentent son point de vue sur la confusion mentale qui domine son époque. Ils ont été une source d’inspiration pour les peintres Jackson Pollock et Arshile Gorky qui sont considérés comme les fondateurs de l’expressionnisme abstrait.
Sources consultées
(X) Extrait du catalogue : Collection art moderne – La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007.
(X) « André Masson (artiste) », [En ligne], Wikipédia, 8 janvier 2023. [http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Andr%C3%A9_Masson_(artiste)&oldid=200251626].
(X) « Étant tout enfant, j’avais horreur de tout ce qui était conformiste », André Masson, Entretiens avec Georges Charbonnier, Julliard, 1958, p. 77.
(X) CRÉAC’H, Martine. « André Masson rebelle? » [archive], Mélusine, 4 février 2016.
Explore quelques œuvres d’André Masson pour découvrir à quoi peut ressembler le processus du dessin automatique initié par cet artiste.
Miró et les hallucinations
L’artiste catalan Joan Miró se joint au groupe surréaliste à Paris au début des années 1920. Ses débuts difficiles dans la grande capitale artistique vont être une source involontaire d’inspirations. En effet, il expérimentera des hallucinations provoquées par la faim qui seront le moteur de ses œuvres qualifiées d’« hallucinées ». Les tableaux qu’il produira dans cette période traduiront des paysages imaginaires peuplés d’étranges créatures mi-organiques, mi-géométriques flottant dans l’espace de la composition. Ces œuvres sont plutôt des dérivés de la technique du dessin automatique, mais les étranges signes qui flottent dans l’environnement de la toile sont le résultat d’un premier geste instinctif.
Sources consultées
(X) FARTHING, S. Tout sur l’art; mouvements et chefs d’œuvres. Montréal, Hurtubise, 2010.
Explore les œuvres suivantes de l’artiste
Les Automatistes au Québec
Il ne faut pas négliger de considérer le groupe des Automatistes au Québec dans les années 1940 et 1950, qui vont poursuivre un travail créatif pictural basé sur des principes similaires explorés par les artistes surréalistes. Par contre, leur utilisation du dessin automatique se fera en retirant toute trace de représentation (figurative) en sondant plutôt les effets picturaux abstraits. Ces artistes ont constitué un groupe de signataires guidé par la figure principale de Paul-Émile Borduas qui a rédigé le manifeste « Refus global ». De plus, un certain nombre d’artistes appartenant à ce mouvement utilisaient le dessin automatique comme méthode, y compris Pierre Gauvreau et Jean Paul Riopelle.
Sources consultées
(X) HISOUR ART CULTURE HISTOIRE, visite virtuelle, exposition d’art, histoire de la découverte, culture mondiale. [https://www.hisour.com/fr/automatic-drawing-painting-17610/]
(X) PEREIRA, L. Astonishing Examples of Automatic Drawing, on Widewalls, Artwork(s) In Focus, Top Lists, Art History. 2016, [https://www.widewalls.ch/magazine/automatic-drawing].
Jean Paul Riopelle, Eaux-mères, 1947
© Succession Jean Paul Riopelle / CARCC Ottawa 2024
Encre sur papier, 27,5 x 45,5 cm
En art actuel, le processus aléatoire du dessin automatique peut aussi être capté à l’aide de technologies numériques comme la photographie ou la vidéo. Par exemple, les traits peuvent être générés par de l’encre ou de la peinture liquide versée dans l’eau, ou bien par des captations de lumière (light painting) ou de fumée en mouvement. Aussi, la technique du dessin automatique se renouvelle dans le monde de l’art actuel par la combinaison des modes d’expression. Par exemple, le dessin sur photographie, la performance/danse et dessin. Le dessin réalisé par le feu, les combustibles ou les explosifs. Voici quelques exemples de dessin automatiques associés avec différents modes d’expression artistiques plus actuels.
Le dessin automatique et la performance
Dans les années 50, Marcel Barbeau a d’abord fait partie du regroupement des Automatistes au Québec. Dans cette période, il explore l’inconscient par des œuvres gestuelles abstraites qui sont inspirées par la psychanalyse. Le travail de Barbeau en tant que peintre et sculpteur s’étend à presque tous les domaines des arts visuels. Il est un artiste pluridisciplinaire qui cherche à repousser les limites entre les disciplines artistiques pour altérer le langage plastique. Ses collages ont été transformés en peintures (de 1959 à 1963 et de 1986 à 2005), en estampes (en 1969) et en sculptures (de 1984 à 1988). Il a également créé des dessins de poèmes qui incorporent des mots et des lettres et qui peuvent avoir l’apparence de peintures en relief (en 1957). Les sculptures qu’il a réalisées ont pris différentes formes, notamment des dessins projetés dans l’espace (de 1971 à 1977) ou des abris légers semblables à des structures architecturales (de 1985 à 1992). Ses performances, qui ont mis en scène l’acte créatif, ont été matérialisées en peintures, en dessins et, avec la collaboration de photographes ou de cinéastes, en photographies, en films et en vidéos, donnant ainsi une permanence à des gestes artistiques éphémères (de 1972 à 1980). Enrichissant son art avec des visions nouvelles inspirées de la science et des nouvelles technologies, il est devenu un témoin de son époque.
Sources consultées
(X) L’Entrepôt numérique d’œuvres artistiques contemporaines, Marcel Barbeau, Arts visuels, Profil de l’artiste, 2015. [https://www.enoac.ca/fr/users/marcel-barbeau]
Marcel Barbeau, Dessin lumineux, 1978
Photo : Robert Etcheverry
Marcel Barbeau, Performance de Marcel Barbeau avec la compagnie Anna Wyman Dance Theater, 1972
Photo : Robert Etcheverry
Marcel Barbeau, Performance de Marcel Barbeau avec la compagnie Anna Wyman Dance Theater, 1972
Photo : Robert Etcheverry
Suggestion d’exercice : Dans l’histoire de l’art, plusieurs artistes ont tenté de traduire en formes en couleurs ou même en graphiques, la musique ou les sons qui les environnaient. Wassily Kandinsky, par exemple, s’est inspiré de la musique pour créer une série d’œuvres nommées « Composition ». C’est en assistant à une représentation de l’opéra Lohengrin de Richard Wagner dans les années 1890 que Vassily Kandinsky, alors qu’il écoutait la musique, il a commencé à visualiser des couleurs et des formes devant ses yeux, ce qui lui a inspiré par la suite plusieurs œuvres picturales. Il associait les couleurs et les formes à des sons ou des vibrations, ce qui est un phénomène rare appelé synesthésie. Il peut être intéressant de se concentrer sur les sons et d’essayer de traduire ceux-ci en lignes improvisées sur des supports de diverses grandeurs permettant au corps de s’investir dans le processus.
Sources consultées
(X) GUEZ, Salomé. « Les sons et les couleurs de Kandinsky se révèlent en ligne », [En ligne], dans Connaissance des arts, 18 février 2021. [https://www.connaissancedesarts.com/artistes/vassily-kandinsky/centre-pompidou-les-sons-et-les-couleurs-de-kandinsky-se-revelent-en-ligne-11153269/].
Autres sources consultées
(X) FERRAND, P-Y. « Le surréalisme, l’art polymorphe » [En ligne], dans Apprendre à dessiner, [https://www.apprendre-a-dessiner.org/le-surrealisme-lart-polymorphe/]
(X) ELLSWORTH, Kelly. Automatic Drawing: Pine Branches, MoMA, [https://www.moma.org/collection/works/37190].
(X) « Wolfgang Tillmans », [En ligne], Wikipédia, [https://en.wikipedia.org/wiki/Wolfgang_Tillmans].
(X) Light painting. (2020, novembre 28). Wikipédia, l’encyclopédie libre. Page consultée le 18 h 1, novembre 28, 2020 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Light_painting&oldid=177067600
(X) INCREDIBLE SNAPS. Light Painting Photography by Janne Parviainen, 25 août 2022, [https://www.incrediblesnaps.com/light-painting-photography-by-janne-parviainen].
(X) ART WORKS FOR CHANGE. Cai Guo-Qiang, Art Word for change, [https://www.artworksforchange.org/portfolio/cai-guo-qiang/].
(X) PIYASENA, S. et Philip, B. À vos crayons!, Pyramyd, Paris, 2014. p 34-35.
(X) AULNAS, P. Art non figuratif après 1945, Rivage de bohème, [http://www.rivagedeboheme.fr/pages/arts/peinture-20-21e-siecles/l-art-abstrait-apres-1945.html].